Histoire du monument Abbatiale Saint-Ouen de Rouen

 

Eglise principale et jadis réservée aux moines de l’ancienne abbaye de Saint-Ouen, l’abbatiale Saint-Ouen marque, à l’instar de la cathédrale, le paysage de Rouen.

De la nécropole d’origine à l’église paroissiale actuelle, des premiers bâtisseurs du Moyen Âge aux architectes, restaurateurs, charpentiers, couvreurs, maçons, aux hommes et aux femmes qui œuvrent aujourd’hui sur le chantier, elle est le fruit d’une longue histoire qui se perpétue toujours...

De la nécropole à l’abbatiale romane...

La présence d’un vaste cimetière sur le site est attestée dès le VIe siècle ; c’est là qu’une basilique Saint-Pierre destinée à abriter la sépulture de saint Ouen, évêque de Rouen au VIIe siècle, aurait été édifiée de son vivant. Après sa mort, la basilique vouée à son culte devient un centre de pèlerinage.

C'est probablement au VIIIe siècle que l'archevêque de Rouen, Rémy, introduit la règle bénédictine à Saint-Ouen et y fonde une abbaye. Au IXe siècle, les invasions Vikings obligent les moines à s'exiler dans l'Eure où ils emportent les reliques de leur saint. Ce n’est qu'après la création du duché de Normandie en 911 que les moines reviennent à Rouen.

Grâce aux donations des premiers ducs de Normandie, au XIe siècle, de nouveaux bâtiments monastiques sont érigés ainsi qu'une grande église romane, à l'emplacement de la basilique, par l'abbé Nicolas de Normandie.

Au cours des deux siècles qui suivent, de violents incendies endommagent l'église abbatiale et les bâtiments monastiques. Alors que ceux-ci sont reconstruits, comme le cloître ainsi que le mur d'enceinte entourant l'abbaye, le chevet de l'église abbatiale s'effondre en 1318. Seule la Tour aux Clercs résiste et demeure visible depuis les jardins de l’Hôtel de Ville, côté bassin.

 

De l’abbatiale gothique à aujourd’hui

Au XIVe siècle, l'abbaye atteint l'apogée de sa prospérité sous l'abbatiat de Jean Roussel, dit « Marc d'Argent », alors à la tête de l'un des monastères les plus riches de Normandie. Il entreprend dès 1318 la construction d'une église gothique grandiose dont le chantier va durer deux siècles. En 1339, le chœur est levé, voûté et vitré, les piles du transept et la première travée de la nef sont commencées.

En raison du ralentissement des travaux pendant la guerre de Cent ans, le transept n’est achevé qu’au milieu du XVe siècle et la tour centrale commencée jusqu'au 1er étage.
La nef est réalisée ensuite en tranches successives et est terminée en 1549.
Le portail occidental est encore inachevé avec ses deux tours de biais qui sont élevées jusqu’à la hauteur de la rose. Les guerres de religion de 1562 et les besoins dispendieux d’abbés peu scrupuleux – qui grâce au système de la commende prélevaient leurs propres revenus sur les biens de l’abbaye - entraînent le déclin de l'abbaye durant la fin du siècle.

Il faudra attendre 1660 et la reprise en main de l'abbaye par des moines de la stricte congrégation de Saint-Maur pour que l’abbaye retrouve un rayonnement intellectuel. L'église gothique ne fait cependant l'objet d'aucun chantier et au XVIIIe siècle seuls les bâtiments monastiques font l’objet de travaux.

A la Révolution, après la dissolution de la Congrégation de Saint-Maur en 1790, les moines sont expulsés et l'abbatiale est convertie en atelier de forge pour la fabrication d'armes. Elle est rendue en 1801 au clergé catholique et le mouvement romantique et le regain d'intérêt pour les monuments gothiques qui se développent tout au long du XIXe siècle conduisent à la reconstruction de la façade occidentale.

Après diverses polémiques sur la question de la destruction des amorces des tours du XVIe siècle, le projet de l'architecte Grégoire est retenu. La construction achevée en 1851 fait l'objet de nombreuses critiques qui portent sur l'aspect colossal du portail et des tours latérales masquant la tour couronnée.

Aujourd'hui, l'abbatiale reste affectée au culte. Elle est largement ouverte au public et est aussi le lieu d'événements culturels et notamment de concerts et festivals dédiés aux orgues.